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Qu’est-ce que la Vérité ? – La question la plus vieille du Monde

Introduction

Le prétoire s’emplit d’une lumière pâle, filtrée par les colonnes massives. Dans l’air flotte une lourdeur presque tangible, faite de sueur, de poussière et de tension. À l’extérieur, la foule se déchaîne : cris, clameurs, appels à mort. Des vagues de colère montent et s’écrasent contre les murs de pierre, comme une mer hostile battant une falaise. Mais ici, à l’intérieur, tout semble figé. Le silence domine, oppressant, coupé seulement par le cliquetis des armes des soldats romains.

Au centre, Jésus. Ses mains liées tombent devant lui. Son visage porte les marques de la nuit passée : tuméfié par les coups, souillé par les crachats. Sa joue est encore rouge d’une gifle, et ses lèvres fendillées témoignent de la violence subie. Ses vêtements, simples, sont froissés et tachés de poussière. Malgré tout, son regard reste étonnamment clair, habité d’une douceur qui contraste avec la brutalité qu’il vient d’endurer. Il ne parle pas, et ce silence résonne.

À quelques pas de lui, Ponce Pilate. Drapé dans sa toge blanche, bordée de pourpre, il incarne l’autorité de Rome, mais ses gestes le trahissent. Ses doigts serrent nerveusement le tissu. Son regard, lourd, cherche à percer le mystère de cet homme. Ce n’est pas la première fois qu’il fait face à un accusé ; il en a vu, des criminels, des rebelles, des coupables. Mais celui-ci… celui-ci n’a pas l’air d’un condamné.

Sur le côté, légèrement en retrait, sa femme observe. Ses traits sont tirés, ses paupières lourdes. Ses yeux, fatigués par une nuit sans sommeil, révèlent une inquiétude profonde. Elle a rêvé. Un rêve troublant. Un avertissement. Depuis l’aube, elle répète à son mari de ne rien avoir à faire avec cet homme. Son regard, posé maintenant sur Jésus, semble implorer Pilate une fois encore.

Pilate inspire, s’avance et d’une voix grave ordonne que l’accusé soit conduit à l’écart, loin de la clameur de la foule. Les lourdes portes du prétoire se referment derrière eux, étouffant pour un instant les cris extérieurs. Le silence devient presque absolu. Pilate fixe Jésus.

— « Es-tu le roi des Juifs ? » demande-t-il, la voix hésitante, comme pour sonder une énigme plus qu’un accusé.

Jésus lève lentement les yeux. Sa voix est calme, posée :

— « Dis-tu cela de toi-même, ou d’autres t’ont-ils parlé de moi ? »

Le gouverneur esquisse un sourire amer.

— « Suis-je Juif, moi ? Ce sont ta nation et les grands prêtres qui t’ont livré à moi. Qu’as-tu donc fait ? »

Jésus grimace; son corps est endolori. Après quelques secondes de silence, il répond :

— « Mon royaume n’est pas de ce monde. Si mon royaume était de ce monde, mes serviteurs auraient combattu pour que je ne sois pas livré aux Juifs. Mais maintenant, mon royaume n’est pas d’ici. »

Mon royaume n'est pas de ce monde

Pilate se penche légèrement, troublé par ces paroles.

— « Tu es donc roi ? »

Jésus soutient son regard. Sa voix est claire malgré sa faiblesse physique :

— « Tu le dis, je suis roi. Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. Quiconque est de la vérité écoute ma voix. »

Pilate se fige. Les soldats retiennent leur souffle. Puis, lentement, il s’avance. Le bruit de son pas résonne lentement dans le prétoire. Arrivé près de Jésus, le gouverneur, approchant son visage de celui du prisonnier, plonge son regard dans ses yeux.

— « Qu’est-ce que la vérité ? » dit-il enfin, avec défiance.

À cet instant, un garde franchit la porte du prétoire. Il vient du dehors, et ses hommes sont débordés :

— « Gouverneur Pilate, la foule s’agite. »

Pilate l’interrompit d’un geste sec de la main. Le garde se retire aussitôt, laissant de nouveau la salle plonger dans le silence.

Alors, Pilate pivote sur ses talons et se dirige lentement vers la sortie du prétoire. Ses épaules semblent s’alourdir à chaque pas.

« Ces Juifs ne causent que des problèmes. », pense-t-il, passant devant le buste de Tibère.

Le visage assombri, il franchit les montants massifs de la porte. Devinant la silhouette de sa femme dans l’ombre, il évite son regard. Il sait ce qu’il y lirait.

Pilate soupire : « Je devrai m’en laver les mains. »


Une question qui traverse l’Histoire

La voix de Pilate ne résonne plus dans les murs du prétoire; seuls des vestiges témoignent de la grandeur du prestigieux bâtiment romain. Cependant, les mots de Pilate résonnent encore et ont traversé les siècles. Car cette question n’est pas seulement celle d’un Gouverneur romain. Elle portait en elle le poids d’une époque, d’un monde, et d’une humanité entière en quête de sens.

Dans la bouche de Pilate, ces mots traduisent d’abord la fatigue d’un homme politique rompu aux intrigues, aux manipulations, aux demi-mensonges qui régissent la vie publique. Gouverner la Judée, région turbulente, c’était composer chaque jour avec la duplicité des chefs religieux, la ferveur des foules et la dureté de Rome. La vérité, dans ce contexte, semblait être une monnaie rare, souvent remplacée par l’opportunité, le compromis, ou la force.

Propositions de réponse au cours des siècles

Mais au-delà de Pilate, cette question reflète le monde antique. Les Grecs avaient déjà cherché la vérité par la philosophie : Parménide et son être immuable, Socrate et son « connais-toi toi-même », Platon et son monde des Idées. Les Romains, plus pragmatiques, voyaient la vérité surtout comme conformité au droit, à la parole donnée, à la justice civile. Or, face à Jésus, ce concept vacille. Car l’homme qui se tient devant Pilate ne parle pas d’une vérité abstraite, mais d’une vérité vivante, incarnée.

Depuis ce jour, la question de Pilate n’a cessé de résonner. Elle a traversé le Moyen Âge, nourri les débats des théologiens et des philosophes, animé la Renaissance, enflammé les révolutions intellectuelles et politiques. Chaque génération, chaque civilisation, chaque homme ou femme a dû, d’une manière ou d’une autre, s’y confronter.

Un parallèle avec aujourd’hui : le post-modernisme

Et aujourd’hui ? Le post-modernisme a profondément bouleversé notre rapport à la vérité. Dans un monde saturé d’informations, de récits contradictoires et de relativisme, on en vient parfois à douter qu’il existe encore une vérité objective. On préfère parler de « ma vérité », de « ta vérité », plutôt que de réalité. La question de Pilate, dans ce contexte, paraît presque dépassée. Est-il encore légitime de chercher « la » vérité ? Ou n’est-elle qu’une illusion, une construction culturelle parmi d’autres ?

L’attitude de Pilate dans le prétoire, face à Jésus, résonne étrangement avec notre époque post-moderne. Dans son questionnement hésitant — « Qu’est-ce que la vérité ? » —, on perçoit un homme confronté à une pluralité de récits : les accusations des prêtres, les attentes de la foule, les avertissements de sa femme, et les paroles énigmatiques de Jésus. Cette indécision reflète un relativisme latent, où la vérité semble diluée dans une mosaïque de perspectives. Rien n’a vraiment changé aujourd’hui. Comme Pilate, nous vivons dans un monde où chacun forge sa propre vérité, où les informations contradictoires et les croyances subjectives dominent.

Chacun sa « vérité »

À l’époque de l’Empire romain, ce relativisme était déjà palpable. L’Empire tolérait une multitude de cultes — des milliers de dieux honorés à travers ses provinces — tant que les sujets se soumettaient à l’autorité de l’empereur, souvent divinisé lui-même. Cette liberté religieuse, apparente, masquait une soumission pragmatique : croire ce qu’on veut, pourvu que l’ordre romain soit préservé. De même, aujourd’hui, le post-modernisme encourage chacun à adopter « sa vérité » — que ce soit à travers des idéologies, des spiritualités ou des récits personnels — dans un cadre où le relativisme règne, tant que cela n’entrave pas les structures sociales dominantes.

Jésus est La Vérité

Pourtant, face à cette dispersion, Jésus se dresse comme une réponse incarnée. Dans le prétoire, il affirme :

« Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. Quiconque est de la vérité écoute ma voix. »
– Jean 18:37-38

Contrairement à la tolérance polythéiste de Rome ou au subjectivisme post-moderne, il propose une vérité unique, vivante, ancrée en lui-même:

« Jésus lui dit: Je suis le chemin, la vérité, et la vie. Nul ne vient au Père que par moi. »
– Jean 14:6

Dans un monde où Pilate, comme nous, se perd dans l’incertitude, Jésus offre un ancrage. Sa vie, sa mort et sa résurrection transcendent les vérités fragmentées, invitant à une unité qui défie le chaos des explications multiples.

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